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  • : Le blog en français de Karim METREF
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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 01:25

http://img.over-blog.com/300x196/2/46/51/83/nuit-noire.jpgAujourd'hui, c'est le cinquantième anniversaire du massacre du 17 Octobre 1961 à Paris.

La guerre d'Algérie tirait à sa fin. Le bras de force militaire tournait décidément en faveur de l'armée française, mais au niveau politique, le Front de Libération Nationale (FLN) algérien remportait bataille après bataille. Le 17 Octobre, ce dernier lance un appel pour manifester à Paris, au cœur de l'empire. La « nation des droits de l'homme » n'a pas hésité à massacrer des centaines de manifestants désarmés. Un des nombreux crimes contre l'humanité de la puissance coloniale, mais celui-ci plus embarrassant que les autres, parce que accompli au cœur même de l'empire.

 

 

Une victoire militaire et une défaite politique

Ce que les autorités françaises continuent à appeler «Les Événements d'Algérie », c'est à dire la guerre d'Algérie, à la fin des années cinquante était au sommet de son intensité. Le colonel Massu, en 1957, en anéantissant en moins d'un an les réseau de guerre urbaine des rebelles, dans ce qui devint celebre sous le nom de « Bataille d'Alger », a prouvé que le FLN pouvat être battu, du moins militairement. A condition bien sùr d'y mettre l'engagement et les moyens adéquats: surveillance et militarisation du territoire, infiltrations, arrestations en masse, torture systématique et démantèlement des réseaux de soutien. Après cette victoire, l'armée française décide de lancer une grande offensive http://idata.over-blog.com/2/46/51/83/battaglia-alg.jpgpour éradiquer l'âme de la rebellion: l'Armée de Libération Nationale (ALN), cachée dans les montagnes du pays.

Des opérations meurtrières furent lancées dans différentes parties du pays. Les opérations "Challe" Dans les montagnes et de l'Ouarsenis et de l'Aures, et l'opération «Jumelle», en Kabylie, firent des centaines de milliers de victimes. L'ALN est esténuée. Les moudjahidin survivant étaient peu nombreux, mal équipés, mal nourris et en fuite continue. La guerre militaire semblait en passe d'être gagnée par l'armée coloniale. Seulement que le FLN, sur le plan politique, incitant les forces coloniales à commettre carnage après carnage, était en train de gagner la partie.

Sa délégation avait régulièrement accès à l'ONU et le mouvement de libération jouissait du soutien de nombreux pays à travers le monde. La grève générale du 28 Janvier 1957 et les manifestations populaire du 9 Décembre 1960, à Alger et dans plusieurs villes d'Algérie, avaientt prouvé au monde que les guerriers avaient un peuple derrière et qu'ils n'étaient pas seulement une bande armée comme les décrivait la presse française.

Mais la botte secrète, les stratèges du Front ont voulu l'asséner sur le sol français. Dans la gueule du loup, comme ils disaient alors.

 

La Fédération de la France

http://img.over-blog.com/196x272/2/46/51/83/7em.jpgLes travailleurs algériens en France étaient des centaines de milliers. Portés à plein navires après chaque guerre mondiale pour reconstruire le pays. Au début c'était de la pure main d'œuvre. Ils accomplissaient, pour une bouchée de pain, les tâches les plus dure, les plus sales et les plus dangereuses, et puis, fini le travail, ils devaient aller se planquer dans les foyer d'accueil pour travailleurs étrangers. La législation de l'époque n'avait pas prévu la présence des épouses et des enfants de ces travailleurs. Et qui a décidé de les apporter, a dû quitter les foyer et est allé construire une baraque de tôle et de carton dans les banlieues des grandes villes.

C'est dans ces foyers et dans ces bidonville qu'en 1957, tandis que Massu démantelait les réseaux créés par Larbi Benmhidi à Alger, d'autres militants du Front organisaient les réseaux de ce qui deviendra la Fédération de France du FLN. Un véritable poumon pour l'organisation. La nouvelle Fédération mettra au point un véritable système de racket et ramasse des montagnes d'argent auprès des travailleurs immigrés. Elle assure à l'ALN armes et équipements, et au politiciens du FLN à l'étranger le amoyens pour leurs séjours et leurs déplacements. Elle crée des liens directs avec des organisations internationales et les pays du bloc socialiste.

En outre, la Fédération de France est en contact avec la crème de la culture française et a portéla gauche française , petit à petit, d'abord l'extrême gauche, puis certains gros bonnets du Parti Communiste, à prendre clairement position en faveur de l'indépendance de l'Algérie, et même à collaborer dans les opérations de lutte armée.

Mais tout cela n'est pas suffisant. Le FLN dècide d'amener le conflit en terre de France. Pour faire voir au peuple français et au monde entier sur quel lit de violence et d'hypocrisie repose la grandeur de la République française. Le choc ne tarde pas à avoir lieu. Dur et cruel comme savent être les guerres urbaines. Attentats, bombes, assassinats, répression, arbitraire, torture, exécutions sommaires, peur, haine, chasse à l'homme et lynchages ...

Les services français arrivent jusqu'à créer une organisation de faux terroristes, « La Main Rouge», qui aura pour mission celle de liquider physiquement les sympathisants et collaborateurs français du Front de Libération.

 

La nuit du carnage silencieux

C'est dans cette atmosphère explosive que le FLN lance l'appel pour la manifestation du 17 Octobre 1961. Quelques http://img.over-blog.com/347x247/2/46/51/83/mattanza.jpgsemaines avant, le préfet de Paris, Maurice Papon, avait décrété le «couvre-feu ethnique»: interdit aux algériens de circuler entre vingt heure et cinq heure du matin. Juste le temps pour aller au travail et rentrer à la maison. La vie est déjà dure pour les travailleurs nord-africains, elle devient un enfer, prison ferme pour une population entière.

Le Front a appelé les Algériens, hommes, femmes et enfants à sortir en masse et se diriger vers les principales places et rues de Paris. L'organisation est parfaite. Et la participation obligatoire, sous peine de mort. Pas d'affiches, pas de tracts distribués. Les militants font le porte à porte et mobilisent la population. Les directives sont claires et précises: quitter la maison, en famille, bien habillés, ne rien porter dans les poches ou dans les sacs qui puisse être considéré comme une arme (couteau, tournevis, lame...), violer collectivement le couvre-feu et se regrouper dans les palces et les boulevards principaux de la capitale en criant des slogans contre le couvre-feu et pour l'indépendance. .

L'organisation a été si efficace que lorsque le préfet Maurice Papon a été averti c'était dèjà l'après-midi du 17 Octobre. Le télégramme envoyé par la préfecture à tous les postes de police de la capitale arrive à 16h30. Lorsque ils réussissent à mobiliser la police, les premiers manifestants étaient déjà sur les moyen de transport qui les portaient des banlieues vers le centre-ville.

Mais la répression sera quand même sauvage. Papon, après consultation avec le ministre de l'intérieur de l'époque, Roger Frey, donne carte blanche aux troupes pour empêcher l'arrivée des manifestants sur les lieux de rassemblement par tout moyen. Des dizaines de milliers de personnes sont arrêtées, séquestrées dans les moyens de transport, enfermées dans les stations de métro, les salles de sports... c'est un véritable massacre. Tirs à balles réelles, passages à tabac, tortures... Des centaines de personnes, vivante ou morte, sont jetées dans la Seine.

 

Esclavage - Inégalité - Férocité

http://idata.over-blog.com/2/46/51/83/lberte.jpgLe budget est très lourd. Au moins 200 morts et des milliers de blessés. Une véritable guerre contre des civils désarmés. Un massacre digne de ceux que le pouvoir colonial a souvent perpétré loin de de la métropole, dans les colonies. Mais cette fois-ci, même s'il fait semblant de ne pas voir vu, le citoyen français ne pouvait plus vraiment ignorer la réalité. Les corps qui flottaient sur le Seine par dizaines, parlaient d'eux-mêmes. Qui le voulait, pouvait voir clairement que sur l'autre face des pièces de monnaie française il était écrit avec le sang des colonies: «Esclavage - Inégalité - Férocité."

La France officielle n'a toujours pas reconnu le massacre du 17 Octobre 1961. Tout comme elle ne reconnaît aucun des crimes contre l'humanité commis en deux siècles de colonialisme.

Maurice Papon, devenu pa la suite ministre, a été arrêté et jugé en 1998 pour complicité de crimes contre l'humanité pour sa participation, en tant que secrétaire de préfecture, à la déportation de milliers de Juifs vers les camps d'extermination pendant la Seconde Guerre le monde. Mais pendant qu'il était jugé pour un crime dans lequel il a collaboré en tant que simple exécutant, des associations franco-algérienne qui revendiquent justice pour les victimes de la violence coloniale n'ont pu introduire parmis les chefs d'accusations les crimes que Papon avait ordonnés et dirigés personnellement ( avec l'approbation du ministre et de Charles de Gaulle, bien sûr).

Officiellement, le seul mal est et reste le nazisme. Les crimes du colonialisme ne sont pas à l'ordre du jour de la justice française, ni de la justice européenne ... et ne le sera peut-être jamais.

 

 

 

 

 

Pour en savoir plus:

17 décembre 1961 Collectif: http://www.17octobre61.org/

 

Livres

Octobre 1961. Un massacre à Paris, Jean-Luc Einaudi, Fayard, 2001

La 7ème Willaya. La Guerre du FLN en France, 1954-1962, Ali Haroun, Seuil , 1986

Meurtres pour mémoire, Didier Daeninckx, Gallimard, 1984

Les Ratonnades d’Octobre. un meurtre collectif à Paris, Michel Levine, Ramsay, 1985

 

Films

Ici on noie les algériens - 17 octobre 1961, Yasmina Adi, 2011

Hors la loi, Rachid Bouchareb, 2010

L'ennemi intime, Florent Emilio Siri, 2007

Nuit noire 17 octobre 1961, Alain Tasma. 2005

Meurtres pour mémoire, Laurent Heynemann, 1985

Octobre à Paris, Jacques Panijel (tourné à Paris quelques mois après les événements), 1962

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lien vers http://www.dailymotion.com/video/xl0lyn_hocine-le-combat-d-une-vie_news<br /> En 1975, quatre hommes cagoulés et armés pénètrent dans la mairie de Saint Laurent des arbres, dans le département du Gard. Sous la menace de tout faire sauter à la dynamite, ils obtiennent après<br /> 24 heures de négociations la dissolution du camp de harkis proche du village. A l'époque, depuis 13 ans, ce camp de Saint Maurice l'Ardoise, ceinturé de barbelés et de miradors, accueillait 1200<br /> harkis et leurs familles. Une discipline militaire, des conditions hygiéniques minimales, violence et répression, 40 malades mentaux qui errent désoeuvrés et l' isolement total de la société<br /> française. Sur les quatre membres du commando anonyme des cagoulés, un seul aujourd'hui se décide à parler.<br /> <br /> 35 ans après Hocine raconte comment il a risqué sa vie pour faire raser le camp de la honte. Nous sommes retournés avec lui sur les lieux, ce 14 juillet 2011. Anne Gromaire, Jean-Claude<br /> Honnorat.<br /> <br /> <br /> Sur radio-alpes.net - Audio -France-Algérie : Le combat de ma vie (2012-03-26 17:55:13) - Ecoutez: Hocine Louanchi joint au téléphone...émotions et voile de censure levé ! Les Accords d'Evian<br /> n'effacent pas le passé, mais l'avenir pourra apaiser les blessures. (H.Louanchi)<br /> <br /> Interview du 26 mars 2012 sur radio-alpes.net
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L
HARKIS LES CAMPS DE LA HONTE : lien vers http://www.dailymotion.com/video/xl0lyn_hocine-le-combat-d-une-vie_news<br /> En 1975, quatre hommes cagoulés et armés pénètrent dans la mairie de Saint Laurent des arbres, dans le département du Gard. Sous la menace de tout faire sauter à la dynamite, ils obtiennent après<br /> 24 heures de négociations la dissolution du camp de harkis proche du village. A l'époque, depuis 13 ans, ce camp de Saint Maurice l'Ardoise, ceinturé de barbelés et de miradors, accueillait 1200<br /> harkis et leurs familles. Une discipline militaire, des conditions hygiéniques minimales, violence et répression, 40 malades mentaux qui errent désoeuvrés et l' isolement total de la société<br /> française. Sur les quatre membres du commando anonyme des cagoulés, un seul aujourd'hui se décide à parler.<br /> <br /> 35 ans après Hocine raconte comment il a risqué sa vie pour faire raser le camp de la honte. Nous sommes retournés avec lui sur les lieux, ce 14 juillet 2011. Anne Gromaire, Jean-Claude<br /> Honnorat.<br /> <br /> <br /> Sur radio-alpes.net - Audio -France-Algérie : Le combat de ma vie (2012-03-26 17:55:13) - Ecoutez: Hocine Louanchi joint au téléphone...émotions et voile de censure levé ! Les Accords d'Evian<br /> n'effacent pas le passé, mais l'avenir pourra apaiser les blessures. (H.Louanchi)<br /> <br /> Interview du 26 mars 2012 sur radio-alpes.net
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V
<br /> Je vous signale la réédition de l'ouvrage : " Les ratonnades d'octobre". Par Michel Levine<br /> Editions Jean-Claude Gawsewitch 2011.<br /> <br /> En octobre 1961. A Paris, en pleine guerre d'Algérie, Maurice Papon, préfet de police et chef de la répression, instaure un couvre-feu pour les Algériens, citoyens français de seconde zone : chasse<br /> au faciès, interpellations systématiques, bouclages de quartiers, etc. Les conditions de vie deviennent infernales pour des milliers d'hommes et de femmes.<br /> En protestation contre ces mesures qui rappellent l'occupation nazie, le F.L.N. organise le 17 octobre une manifestation pacifique. Aussitôt, Papon "chauffe ses troupes". La machine à tuer est en<br /> marche…On retrouvera des centaines de cadavres dans la Seine.<br /> Le crime commis, c'est le grand silence de la part des autorités et des médias, un mutisme absolu qui durera longtemps. Pour la première fois, on dévoile ce qui était ignoré de l'historiographie<br /> officielle ou soigneusement refoulé. L'auteur s'est livré à une véritable enquête, interrogeant victimes, avocats, témoins.<br /> Michel Levine revient sur cette période tragique de l'Histoire à l'occasion du 50e anniversaire des évènements d'octobre 1961.<br /> <br /> Michel Levine est historien des Droits de l'Homme. Il a notamment publié chez Fayard Affaires non classées (Archives inédites de la Ligue des Droits de l'Homme).<br /> <br /> <br />
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V
<br /> Je vous recommande la lecture de l'ouvrage réédité : " Les ratonnades d'octobre". Par Michel Levine<br /> Editions Jean-Claude Gawsewitch 2011.<br /> <br /> En octobre 1961. A Paris, en pleine guerre d'Algérie, Maurice Papon, préfet de police et chef de la répression, instaure un couvre-feu pour les Algériens, citoyens français de seconde zone : chasse<br /> au faciès, interpellations systématiques, bouclages de quartiers, etc. Les conditions de vie deviennent infernales pour des milliers d'hommes et de femmes.<br /> En protestation contre ces mesures qui rappellent l'occupation nazie, le F.L.N. organise le 17 octobre une manifestation pacifique. Aussitôt, Papon "chauffe ses troupes". La machine à tuer est en<br /> marche…On retrouvera des centaines de cadavres dans la Seine.<br /> Le crime commis, c'est le grand silence de la part des autorités et des médias, un mutisme absolu qui durera longtemps. Pour la première fois, on dévoile ce qui était ignoré de l'historiographie<br /> officielle ou soigneusement refoulé. L'auteur s'est livré à une véritable enquête, interrogeant victimes, avocats, témoins.<br /> Michel Levine revient sur cette période tragique de l'Histoire à l'occasion du 50e anniversaire des évènements d'octobre 1961.<br /> <br /> Michel Levine est historien des Droits de l'Homme. Il a notamment publié chez Fayard Affaires non classées (Archives inédites de la Ligue des Droits de l'Homme).<br /> <br /> <br />
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